Le jardin dans l'art
Le 08/11/2019
Prochaine conférence : jeudi 14 novembre 2019 à 14 h 45 au Ciné Dyke
Les jardins dans l’art
par Anne Muller, artiste plasticienne et conférencière.
Les jardins, créations par nature éphémères, ont toujours été une source d’inspiration pour les artistes, dont les œuvres constituent en outre une documentation précieuse pour qui s’intéresse à l’art des jardins. Du Paradis médiéval au « jardin planétaire » contemporain et au Land Art, le jardin est par excellence un lieu de création où s'exprime l'évolution de nos représentations du monde et l’on doit aux artistes d’en avoir fixé la mémoire dès l’origine.
Au commencement était un jardin : les premières traces artistiques de jardins aménagés se trouvent en Mésopotamie, là où la tradition situe l’Eden, lieu de paix et de joie, irrigué par les eaux, enchanté par la musique et les parfums. Depuis l’antiquité, les mythiques jardins suspendus de Babylone hantent l’imaginaire occidental à la manière d’un paradis perdu que les hommes n’ont eu de cesse de recréer. L’antiquité grecque et romaine a donc copié les jardins d’agrément de Perse et d’Orient, ce dont témoignent les images idylliques des fresques pompéiennes aux jardins toujours verts et éternellement fleuris. A partir du VIIe siècle, le vert devient la couleur emblématique de l’Islam car les arabes découvrent eux-aussi en Perse le Paradis promis par le prophète, qu’ils représenteront bientôt dans leurs miniatures comme un jardin luxuriant, symbole de vie et d’espoir. Et c’est l’Islam qui transmet l’art des jardins au Moyen-âge. Jardin clos, toujours fleuri et luxuriant, ainsi nous apparait le jardin médiéval, jardin d’amour divin ou courtois, qui préfigure les béatitudes de la Jérusalem céleste.
Né en Italie, le jardin humaniste de la Renaissance fait revivre l’idéal antique, cet idéal même qui irriguera au siècle suivant la nature contrainte du jardin à la française, dans une métaphore théâtralisée du pouvoir monarchique. Au 18e siècle, l’Angleterre plante ses jardins comme on peint des tableaux, invente le pittoresque, le parlementarisme et défend la liberté de la nature. La France l’imite, ce sera le jardin des Lumières, lieu d’inspiration poétique et de réflexion philosophique où s’enracine notre moderne sentiment de la nature. Dès lors l’amour de la nature ne cessera d’inspirer les artistes et certains, comme Monet, se feront jardiniers pour mieux réinventer l’art de la peinture. L’Art nouveau qui ouvre le XXe siècle est un hymne qui exalte la nature jusque dans les arts décoratifs, contribuant à démocratiser le goût des jardins. La prise de conscience écologique des dernières décennies a élargi le jardin aux dimensions de la Terre, Le Land Art , en faisant de la nature un matériau artistique nous apprend à la voir autrement, à l’aimer et à la protéger.